MM UT 3. La reine de la Méditerranée

MM UT 3. Texte publié. La reine de la Méditerranée. Lettre au journal VERDENS GANG 28 janvier 1891

Nice, 28 janvier

Nice est la ville du plaisir, de la santé
Et de la beauté.

Tandis qu’en Europe sévit
un froid sibérien – alors qu’une tempête de neige
s’abat sur Alger et l’Italie et des enfants
meurent de froid dans les rues de Toulon
et de Marseille je suis ici à Nice
à prendre le soleil devant ma fenêtre ouverte.

Le soleil brille tout le temps, chaud comme
par une journée de juin

Jamais la reine de la Méditerranée
n’a été plus séduisante, plus rayonnante
de beauté.

La Promenade des Anglais vibre
dans le soleil de midi bordée
par la mer d’un côté et par toute une série
d’Hôtels et de petites villas
de l’autre.

Il y a une foule de promeneurs – scintillante
de parasols rouges et blancs et de
toilettes printanières bariolées.

Ici passent en même temps la pâle miss, l’élégante parisienne
avec son minuscule chien d’appartement,
le dandy boulevardier affublé
de pantalons larges comme des sacs et
le phtisique entortillé dans
des châles.

Le bleu de la mer s’étend vers le large – à peine
d’une nuance plus foncée que l’air – une
merveilleuse couleur bleue légère comme l’éther et
de paresseuses vagues viennent en longs rouleaux
mourir sur la plage
à grands fracas.

Le marché de Nice n’est qu’une unique
et énorme plate-bande de fleurs des champs
et de jardins. On les vend par paniers entiers
– car le Prince Carnaval, le bonheur de Nice,
vient dans quelques jours à la rencontre
des centaines de milliers de visiteurs, et sa venue
va être fêtée par de grandes batailles de fleurs
dans les rues.

E.M.